Nagui, Nagui, Nagui. Un animateur-producteur qui est aussi souvent cité dans mes critiques que Charles Yerkes n’est cité dans les vidéos de Jago Hazzard (vous ne connaissez pas ce youtubeur ? En même temps, si le métro londonien et son histoire ne vous passionnent pas, je ne peux pas vous en vouloir ; mais sinon, je vous recommande sa chaîne, qui est instructive). Mais ce n’est pas anormal, dans la mesure où, durant sa carrière, il a eu beaucoup de jeux à son actif, aussi bien en tant qu’animateur qu’en tant que producteur (si ce n’est les deux à la fois), donc d’autant plus de sujets à traiter potentiellement sur ce blog.
Et, forcément, avec autant d’émissions animées et/ou produites de sa part, c’était inévitable qu’il ait son lot de casseroles, sur lequel je me suis déjà pas mal acharné pour la plupart : QLMG, Trouvez l’intrus, N’oubliez pas votre brosse à dents, Ca va être votre fête, Le marathon des jeux TV, La liste gagnante et bien évidemment TLMVPSP (sur laquelle il n’était certes que producteur exécutif). Cela étant, même si certains de ces programmes me restent toujours autant en travers de la gorge, ce serait quand même malhonnête de ma part de résumer sa carrière à ceux-ci ; alors que parallèlement, il y a également eu plusieurs émissions pour lesquelles j’ai beaucoup d’estime, dont certaines que j’ai également traitées sur ce blog, comme Le numéro gagnant, Le coffre, Le cube ou NOPLP (auxquelles je pourrais rajouter Taratata ou The Artist si je m’étendais au-delà des jeux TV).
C’est pourquoi, aujourd’hui, je vais rééquilibrer un peu la balance en sa faveur, en parlant d’un flop de sa part qui ne méritait pas d’en être un : Volte-Face.
Sorti fin 2012 avec la lourde tâche de faire remonter l’access de France 2 à une période délicate pour la chaîne (qui devait notamment trouver la solution miracle pour faire accepter aux spectateurs un énorme tunnel de publicités avant 20 heures, heure au-delà de laquelle elle ne pouvait plus en diffuser, rendant d’autant plus capitaux les enjeux de cette case), il n’y sera pas parvenu. Il aura certes tenu légèrement plus longtemps que Roumanoff et les garçons qui le suivait, mais le public n’avait pas adhéré, pour diverses raisons. Toutefois, peut-être qu’il aurait pu perdurer si la chaîne l’avait laissé s’installer davantage, puisque les audiences avaient commencé à progresser vers la fin de sa diffusion (diffusion de seulement trois mois).
Et si je dis que ça ne méritait pas d’être un flop, ce n’est pas parce que j’ai trouvé ce jeu excellent (quoique, dans mon classement général des jeux que j’ai vus, il serait quand même assez facilement dans le quart de tête je pense), mais parce qu’il avait tout de même des ambitions assez notables, avec en premier lieu la volonté de proposer un concept vraiment original, en plus d’être relativement bien exécuté dans l’ensemble (oui, l’originalité ne fait pas tout, n’est-ce pas TLMVPSP ?). Mais ne me croyez pas sur parole, et laissez-moi tenter d’expliquer pourquoi je le pense sincèrement…
Le concept
Bon, histoire d’expédier ça vite fait : non, ce jeu n’avait pas des règles aussi incompréhensibles qu’on le prétendait à l’époque. Cette « réputation » venait surtout du fait que la mécanique employée par ce jeu avait son petit lot de nouveautés à expliquer, mais que Nagui s’était embrouillé en le faisant, ce qui n’a pas forcément aidé le public à comprendre le jeu à ce moment-là ; surtout quand les sites médias reprennent cet extrait en particulier, et véhiculent donc d’une certaine manière l’image d’un jeu inaccessible aux néophytes. Sans doute les mêmes qui se moquaient de Pyramide (et encore, je concède que Pyramide méritait peut-être un peu plus cette réputation-là, à cause des automatismes élaborés par les joueurs, et de quelques règles ça et là pas foncièrement nécessaires).
Mais là, c’est une question de pédagogie. Même avec une notion a priori pas très complexe, si votre professeur n’arrive pas à vous l’expliquer, la faute incombera à lui, pas à la notion. Ce qui peut être embêtant, dans la mesure où il pourrait même vous en dégoûter (oui, c’est un peu du vécu, une réminiscence de certains cours de ma scolarité où j’avais malheureusement décroché pour plusieurs raisons, dont un manque de clarté de la part de l’enseignant…).
Et Dieu merci, heureusement que les jeux TV peuvent se permettre d’avoir des règles un tant soit peu élaborées de temps en temps, parce que sinon Trouvez l’intrus serait l’un des meilleurs jeux TV jamais diffusés…
Bref. Durant une partie, deux joueurs vont, dans un premier temps, devoir jouer en équipe, pour constituer une cagnotte, qui sera potentiellement remportée par l’un des deux.
Au maximum, douze questions peuvent être posées pendant la partie ; mais celle-ci peut s’arrêter à tout moment, selon le déroulement de celle-ci.
Pour chaque question, on commence par en énoncer le début ; puis les candidats doivent choisir s’ils souhaitent une question facile, medium ou difficile ; en sachant que plus la question est difficile, plus elle vaudra d’argent. Les deux candidats vont voter secrètement de leur côté pour le niveau de la question qu’ils souhaitent, puis on dévoile leur choix. S’ils sont d’accord sur le niveau souhaité, la fin de question correspondante est posée ; s’ils sont en désaccord, c’est le niveau le plus haut des deux proposés qui entre en vigueur.
Ici, la candidate ayant choisi le niveau de difficulté le plus élevé, la question vaudra alors 2000 euros et sera difficile.
La question est alors posée, et les candidats doivent se concerter pour y répondre. Pas de QCM, il faut donner une réponse cash. Et attention, car même si on n’affiche pas de chronomètre lorsqu’on pose la question, on ne se prive pas de mettre un chrono de 10 secondes au bout d’un moment pour les forcer à donner une réponse.
Si cette réponse est correcte, l’argent en jeu sur la question est rajouté à la cagnotte des candidats ; sinon, ceux-ci se prennent une pénalité. Puis on passe à la question suivante. Plus on progresse dans le jeu, plus les sommes en jeu lors des questions posées seront élevées : ainsi, pour la question 1, les sommes en jeu sont respectivement de 200 €, 500 € et 1000 € pour une question facile/medium/difficile ; mais pour la question 12, celles-ci sont respectivement de 5000 €, 12 500 € et 25 000 €.
Attention toutefois à ne pas cumuler les erreurs, car au bout de 3 pénalités, le duo est éliminé et les candidats ne remportent rien.
La question en entier, une fois le niveau de difficulté choisi.
A tout moment, juste après avoir posé le début de la question, une alarme peut se déclencher, et les candidats vont alors se séparer, pour prendre une décision de leur côté.
Volte-Face time !
Après un temps de concertation avec leur « clan » (j’y reviendrai), leurs fauteuils vont cette fois-ci se rapprocher, lentement : puis des sommes seront annoncées. Celles-ci correspondent à un certain pourcentage de la cagnotte accumulée. Tant que les fauteuils continuent à progresser, les candidats peuvent tenter de faire Volte-Face en appuyant sur le buzzer.
Si un candidat fait Volte-Face, il joue alors pour la dernière somme ayant été annoncée, et sur le niveau de question indiqué (plus il buzze tardivement et plus la somme en jeu est élevée, plus la question sera difficile). Il doit alors y répondre seul, en seulement 10 secondes. Si sa réponse est correcte, il gagne la partie (qui prend alors fin à ce moment-là), et repart avec l’argent qui était en jeu lors de son Volte-Face ; sinon, il est éliminé, et l’autre candidat peut tenter sa chance. Si lui non plus n’a pas la bonne réponse, personne ne remporte de gains.
Si, en revanche, aucun Volte-Face n’est tenté, les candidats continuent à jouer normalement en binôme sur la question posée, comme si de rien n’était.
A noter : si les candidats n’ont toujours pas fait Volte-Face avant la question 12, celle-ci sera forcément précédée d’une alarme et l’un des candidats devra obligatoirement faire Volte-Face à ce moment-là.
Plus les fauteuils avancent et se rapprochent, plus les sommes en jeu sont importantes, et plus le niveau de la question sera difficile. Mais est-ce que les candidats seront tentés de buzzer à ce moment-là, ou attendront-ils un moment plus propice ?
Comme vous pouvez le constater, ce concept fait la part belle à la stratégie, sur plusieurs plans.
On a, d’une part, le choix du niveau de difficulté des questions, avec une idée de base simple mais efficace, à savoir plus une question est difficile, plus elle rapporte d’argent. Ce qui s’inscrit d’ailleurs plutôt bien avec le principe du jeu, car ça permet de voir si son adversaire est plutôt joueur ou non, et prêt à prendre des risques pour gagner plus d’argent. Ce jeu étant basé sur le fait de devoir jauger son partenaire, on est pleinement dans cette optique-là.
Et d’autre part, on a la mécanique du Volte-Face qui est également plutôt bien trouvée, et qui offre un bon moment de suspense (… du moins une fois qu’on a davantage avancé dans la partie, les premières fois en revanche on se doute qu’il ne se passera probablement pas grand-chose). Est-ce que l’un des candidats cherchera à prendre l’avantage en buzzant et en mettant fin à la partie ; et si oui, est-ce qu’il préfèrera jouer la sécurité en jouant pour une somme plus faible, ou tentera-t-il quelque chose de plus ambitieux, en sachant que son adversaire peut buzzer avant lui ?
En outre, on a finalement trois scenarii possibles : soit le candidat A gagne, soit le candidat B gagne, soit ils perdent tous les deux. Cette possibilité d’avoir une défaite collective est intéressante, dans la mesure où les émissions ne se termineront donc pas toutes de la même manière.
Détail intéressant : lors de la présentation des candidats, ceux-ci dévoilent leurs forces et leurs faiblesses. De quoi rajouter de la stratégie en se demandant comment l’adversaire réagira sur une question portant sur l’un des thèmes concernés…
L’esprit du Maillon Faible est parmi nous… mais !
Quelque part, avec ce concept, on retrouve un petit peu le même état d’esprit que celui que pouvait avoir Le maillon faible, avec quelques éléments réminiscents aussi bien dans la mécanique de jeu que dans l’ambiance recherchée.
Au niveau de la mécanique, déjà, le parallèle est évident : on a des candidats qui ne se connaissent pas, mais qui doivent collaborer pour établir une cagnotte la plus élevée possible… tout en sachant que seulement l’un d’entre eux pourra repartir avec, et que l’autre ne gagnera rien. Cette façon de collaborer va toutefois différer ; en effet, dans LMF, chacun a ses questions distinctes, là où Volte-Face pose la même question aux deux candidats, rendant leur collaboration plus active dans ce second cas. Dans l’absolu, je préfère légèrement cette seconde façon de faire.
Et la question de la confiance reste également centrale dans les deux cas : on doit à la fois faire confiance à soi-même, et faire confiance ou se méfier de l’adversaire. Ainsi, les choix que doivent faire les candidats pour gérer la cagnotte collective relèvent d’une question de confiance en soi : dans LMF, en se demandant si on doit banquer ou non avant de répondre à sa question, et prendre le risque de faire monter les sommes en jeu ou de les faire redescendre à zéro ; dans Volte-Face, en choisissant un niveau plus ou moins difficile pour avoir plus ou moins d’argent potentiel. En revanche, jauger le niveau de son partenaire est une question de méfiance, pour savoir s’il sera apte à faire grimper la cagnotte ou non.
Un détail qui me plaît bien à ce niveau-là dans Volte-Face, c’est le fait qu’en début de partie, on présente les domaines dans lesquels les candidats sont le plus à l’aise, mais aussi le moins à l’aise. Ce n’est pas une approche tout à fait sans défauts (on y reviendra), mais ça permet aussi aux candidats de jauger leur adversaire d’une certaine façon. Ce que LMF ne permet pas, les présentations y étant plus expéditives, et le choix stratégique (banque ou pas banque) étant soumis au candidat avant de connaître le thème de la question. Bref… à ce niveau-là, je trouve que Volte-Face se débrouille bien, avec même quelques qualités que LMF n’a pas forcément.
Et au niveau de l’ambiance, même si Volte-Face est loin d’être aussi froid que LMF, on sent quand même un peu quelques traits communs ça et là.
Pour commencer : la bande-son. Celle-ci se veut être dans le même style que les « jeux à suspense » façon QVGDM ou justement LMF, en mettant en avant le côté épique et les enjeux potentiellement élevés. Et à ce niveau-là… elle y parvient à peu près, même si je la trouve moins mémorable et qu’à mon avis, on a déjà fait mieux dans le même genre. Après, j’avoue que j’ai un petit peu de mal à prendre au sérieux le jingle principal du jeu, quand ses notes me rappellent le refrain de la chanson Cuisse de mouche de Pierre Perret…
Et pour continuer sur le côté sonore, on a également une voix-off masculine qui commente les phases de « concertation », tout comme celle de LMF commentait les phases de vote des candidats entre deux manches, avant la révélation de cette concertation. Mais autant elle était plus appropriée dans LMF, autant dans Volte-Face elle était plus dispensable (tout comme les phases de concertation elles-mêmes d’ailleurs… on y reviendra).
Un petit coup de stress ? Pour rappeler que les candidats n’ont pas tout le temps qu’ils veulent, le chronomètre des 10 dernières secondes peut se déclencher avec une musique bien stressante pour les forcer à se décider.
Niveau animation en revanche, vous vous doutez que ça va être difficile de comparer Nagui à Laurence Boccolini (c’est marrant de se dire ça quand on sait qui a pris la relève de TLMVPSP et de QLMG à l’époque d’ailleurs…). Certes, les deux animateurs ont montré depuis le temps qu’ils étaient assez polyvalents, et capables de s’adapter à des styles de jeux différents (avec plus ou moins de succès cela dit) ; néanmoins, j’aurais eu du mal à imaginer Nagui animer LMF. Et ça tombe bien, car niveau animation, on sent que l’approche de Volte-Face n’était pas la même.
Car nonobstant ses éléments sonores et la mise en scène pompeuse du jeu, Volte-Face ne cherche pas non plus à paraître 100% sérieux dans son ambiance. Aussi, on a un Nagui qui reste quand même volontiers blagueur, agitateur et parfois moqueur, mais heureusement pas à un niveau horripilant façon TLMVPSP ou QLMG. En fait, par rapport aux autres émissions qu’il a pu animer, son style se rapproche davantage de ce qu’il avait pu faire dans Le coffre. Et, surtout, le côté agitateur est davantage justifié ici : en effet, comme le but de ce jeu est de jouer avec la confiance des candidats, il fera donc assez fréquemment des rappels sur le taux de bonnes réponses de chacun, les sommes misées… et, à l’instar de Laurence Boccolini dans LMF, de l’argent qui aurait pu être gagné s’ils avaient mieux joué (ce qui est d’ailleurs un peu le seul parallèle que je peux faire à ce niveau-là). Au premier abord, je me disais que ce n’était pas très utile, et que c’était limite pour se donner un style façon Denis Brogniart dans Koh-Lanta qui adore jeter de l’huile sur le feu durant les Conseils… mais finalement, ça peut quand même avoir sa petite utilité, dans la mesure où ça peut inciter les candidats à faire Volte-Face plus rapidement.
Enfin, nonobstant un enjeu où (au moins) l’un des deux candidats repartira bredouille, suite à la trahison de son « partenaire », on ne sent pas d’animosité entre ceux-ci. On sent qu’ils sont conscients que ça n’est qu’un jeu, et qu’en dépit des enjeux conséquents, ils ne vont pas non plus chercher à se détester mutuellement. Là où LMF pouvait donner cette impression-là, d’autant plus avec les explications des votants qui pouvaient être douteuses, et les magnétos des candidats éliminés qui pouvaient laisser transparaître une certaine rancœur. Bref, un point pour Volte-Face à ce niveau-là.
Bref, même si Volte-Face m’a un peu rappelé LMF, j’ai trouvé qu’il s’en démarquait tout de même plutôt en bien. Son ambiance est peut-être un peu moins marquante, mais son côté légèrement plus « feel good » est plutôt bienvenu et ne dénature en rien l’ambiance que le jeu cherchait à mettre en place.
Toutefois, je trouve qu’au niveau de la mise en scène… on pouvait peut-être faire légèrement mieux, malgré une bonne base à ce niveau-là.
La mise en scène en fait (un peu) des caisses
Je parlais des concertations entre chaque candidat et leur « clan »… et honnêtement : je trouve qu’elles ne servent à rien, à part remplir quelques minutes du programme de façon pas très inspirée.
Ok, je comprends que c’était un peu le dada de Nagui à l’époque de faire venir les candidats avec leurs proches pour qu’ils puissent les soutenir, comme c’était le cas dans NOPLP version 1, et comme ça a été le cas dans Le cube. Mais dans NOPLP version 1, ils pouvaient servir de joker au candidat, donc avoir un rôle actif. Dans Le cube, ils ne servaient effectivement à rien (enfin, si, à conseiller et soutenir moralement le candidat, quand même…), mais on pouvait les ignorer assez facilement. Ici, en revanche, on met de l’emphase sur eux, pour un rôle qui aurait très bien pu être assumé directement par le candidat. Après tout, dans LMF ou APOAL, les candidats ne se concertent pas avec des proches pour savoir pour qui voter dans leur intérêt, ou s’il faut accepter l’offre du banquier ou pas…
En fait, j’ai l’impression que la production avait besoin de « meubler » les phases de Volte-Face, pour que le mouvement des fauteuils serve concrètement à quelque chose, et pour que ce soit un peu plus « visuel » de les voir rejoindre des gens plutôt que de les expédier dans leur coin comme s’ils étaient punis…
Honnêtement, je n’en ai pas vraiment grand-chose à faire, de ces phases de concertation… à la rigueur, on peut voir ça comme une façon de mettre le rythme du jeu en pause avant un potentiel rebondissement, certes.
Et tant que j’y suis, c’est un peu une conséquence d’un parti pris de ce jeu dont je suis plutôt moyennement fan : sa mise en scène.
Bon, déjà, des fauteuils qui tournent… j’imagine que toute ressemblance avec The Voice, lancé quelques mois plus tôt avec beaucoup de succès, ne serait que purement fortuite ? Mouais…
Mais au-delà de ça, je trouve surtout que cette façon de mettre le jeu en scène n’a pas particulièrement d’intérêt, à part dire « Regardez, on a un plateau de jeu qui paraît super grand et vachement bien équipé ! » ; tout ça pour faire des allers-retours entre les candidats et leur clan respectif. Comme je le disais à l’instant, les réunions avec les clans n’apportent rien de spécial à l’émission, et l’intérêt principal réside dans le fait de pouvoir buzzer pour faire Volte-Face sur le montant en jeu choisi par le candidat désirant le faire.
Limite, on aurait pu conserver l’idée de fauteuils qui tournent, pour symboliser les phases où les candidats doivent jouer individuellement ; mais sans pour autant leur faire parcourir la moitié du plateau. Quant à décider à quel moment buzzer pour déclencher un Volte-Face, un écran avec une indication visuelle aurait amplement suffi.
Enfin… même si elle ne me convainc pas trop, je concède toutefois à ce jeu que cette mise en scène permet de lui conférer un certain style, et d’appuyer les ambitions que le jeu cherchait à démontrer, là où la mécanique originale n’aurait peut-être pas suffi.
Le problème du non-feuilletonnant (encore…)
Pour conclure, revenons sur la mécanique du jeu. En soi, je la trouve relativement solide dans l’ensemble… à un détail près.
En effet, comme vous avez sans doute pu le déduire, il est tout à fait possible que les candidats n’aillent pas jusqu’à la douzième question, et que le jeu puisse prendre fin avant : soit parce qu’ils n’ont pas été très bons et ont donné trois erreurs avant de pouvoir faire Volte-Face, soit parce qu’ils ont fait Volte-Face avant d’atteindre cette dernière question.
Donc on se retrouve avec un jeu dont les parties peuvent théoriquement atteindre des durées variables. Ce qui, la plupart du temps, va de pair avec un format feuilletonnant à la QVGDM.
Sauf que… non. Apparemment, ce jeu n’était pas un format feuilletonnant, et on avait bien une émission = une partie. Ce qui peut donc poser quelques problèmes…
Déjà, eu égard à la durée d’une émission complète (à savoir une quarantaine de minutes), il faut donc pouvoir s’assurer que la partie puisse durer sur l’ensemble de l’émission. Ce qui peut encore rester gérable si un Volte-Face survient vers les dernières questions (sans pour autant atteindre la douzième)… mais qui l’est moins s’il survient relativement tôt.
Bon, cela étant, même en n’ayant pas regardé l’ensemble des émissions diffusées (ça aurait aidé que je ne boycotte pas l’ensemble des émissions animées par Nagui à l’époque, je le reconnais…), je me doute que les candidats n’ont pas dû très souvent être tentés par un Volte-Face dès le premier tiers du jeu, les gains n’étant à ce stade pas particulièrement alléchants (même si certains peuvent s’en contenter).
Ce qui va déjà engendrer un léger problème au passage : le premier Volte-Face proposé par la production n’engendrera sans doute pas beaucoup de suspense, puisqu’on se doutera qu’aucun des candidats ne tentera de le faire.
Le binôme a commis une erreur. Ca va, il y a encore un peu de marge.
Cependant, il y a un autre facteur qui entre en jeu : le nombre d’erreurs.
Pour rappel, dès que les candidats commettent trois erreurs tant qu’ils sont ensemble, la partie est terminée, et personne ne gagne rien. Ce qui a pu motiver certains candidats à tenter un Volte-Face quand la situation devenait un peu trop tendue à ce niveau-là, pour s’assurer qu’ils puissent quand même repartir avec 20% du gain accumulé plutôt qu’avec 100% de rien du tout. Et si ça intervenait dans le premier tiers de jeu ?
Certes, France 2 n’est pas TF1, et contrairement à sa concurrence, elle cherchera généralement à éviter de faire jouer des candidats trop stupides (bon, ce n’était pas le cas de tous les jeux de TF1, mais certains en tenaient quand même une sacrée couche niveau manque de culture générale…) ; ce qui limite tout de même les chances d’avoir trois erreurs d’affilée durant le premier tiers du jeu. Toutefois, on peut quand même supposer que les candidats se laissent tenter par les questions difficiles, pour des questions de stratégie, et que celle-ci ne soit pas récompensée comme il le faut…
Bref, on n’est jamais à l’abri d’une partie susceptible de prendre fin à n’importe quel moment. Théoriquement, la partie peut se terminer aussi bien à l’issue de la douzième question que de la troisième. Et même si je veux bien croire que ce serait un manque de pot total que ce second cas de figure arrive, une fin prématurée au bout de six questions reste plausible. Dans ce cas-là, comment le jeu comptait s’y prendre pour remplir ses quarante minutes ? On ne saura pas…
Alors qu’avec un format feuilletonnant, le problème ne se serait pas posé, et on aurait pu enchaîner le début d’une nouvelle partie pour meubler les 10 minutes restantes.
Après, même si je trouve que cette façon de gérer le jeu est maladroite… je veux quand même bien concéder que ces cas de figure embarrassants pour la production soient suffisamment rares pour les laisser passer. Ca reste géré d’une façon un peu moins gauche que Money Drop suite au reformatage des émissions pour abandonner le format feuilletonnant ; et, surtout, ça reste largement plus acceptable que Still Standing, qui se tirait totalement une balle dans le pied en faisant ça, et en obligeant ce jeu à truquer grossièrement son déroulement pour arriver à ses fins.
« Ford Boyard ». Soit c’est un nouveau modèle d’automobile, soit France 2 n’a pas particulièrement d’estime pour l’un de ses programmes phares. D’un autre côté, en ce début de décennie 2010, Fort Boyard lui-même commençait à ne plus avoir d’estime envers soi-même…
… oui, je sais, ça n’a rien à voir avec Volte-Face, mais je n’ai pas pu m’empêcher de vous partager cette petite perle orthographique (et de glisser un petit tacle à FB comme j’en ai l’habitude quand on parle de cette décennie-là).
Total : 14/20
Même si je trouve que la décennie 2010 amorce un peu le déclin du genre du jeu télévisé, ça fait toujours plaisir de voir qu’elle a tout de même réussi à faire éclore des concepts efficacement créatifs comme Volte-Face, même s’il n’a malheureusement pas réussi à percer. Outre le contexte défavorable auquel il a dû faire face à son arrivée, peut-être arrivait-il à une époque où le public commençait à se lasser des jeux à grand suspense (même si Money Drop lancé un an plus tôt avait plutôt bien fonctionné). Après, je me sens aussi un peu coupable, dans la mesure où je n’ai pas pu le regarder en direct, étant en plein dans ma période « ras-le-bol de voir Nagui partout »… (je vous rassure, elle est terminée depuis un moment, maintenant c’est plutôt Cyril Féraud qui occupe ce rôle-là)
Ca reste dommage, car j’apprécie sincèrement ce que ce jeu a tenté de mettre en place. Un concept original, majoritairement solide, avec une bonne part de stratégie, une ambiance bien maîtrisée (à part peut-être un ou deux détails de mise en scène cependant peu gênants et un rythme qui aurait pu être légèrement mieux géré mais qui passe)… même si ce jeu n’est pas le plus mémorable que j’aie pu voir, j’ai tout de même beaucoup de respect pour ce qu’il a tenté de mettre en place. Je me répète, mais ça reste dommage que les efforts et les moyens fournis ne soient pas toujours très bien récompensés.
Mais bon, heureusement pour France 2, par la suite, elle aura fini par se refaire une santé au niveau de son access. Nous parlerons d’ailleurs la prochaine fois de l’un des jeux qui y ont contribué…