Les cinglés de la télé. Un jeu diffusé en 1999 sur France 2, que je… ne connaissais pas du tout, et auquel un passionné de télévision m’avait conseillé de jeter un œil.
Mais pour le coup, c’est une émission qui semble vraiment être tombée dans l’oubli, à tel point qu’elle ne bénéficiait même pas de sa propre page Wikipédia au moment où j’ai voulu écrire cette critique, et que les seules « informations » que je pouvais avoir dessus, avant d’en visionner un épisode, c’était un vague témoignage sur un skyblog… rédigé à la manière d’un skyblog. Ouch, ça me rappelle l’époque où j’avais commencé à bloguer, avec la candeur de l’adolescence à parler de tout et n’importe quoi n’importe comment, qui faisait que j’aurais honte de me relire aujourd’hui. De toute façon, ne cherchez pas le skyblog en question, je l’ai supprimé depuis belle lurette. Mais ce n’est pas le sujet, revenons à l’émission.
Car nonobstant le manque d’informations sur son déroulement, j’ai quand même pu voir à quoi ressemblait plus précisément ce programme, grâce à un youtubeur qui a eu la bonne idée d’en conserver un numéro. Et… ça valait le coup d’œil, ne serait-ce que pour voir ce qui fut à la fois l’une des premières productions de Catherine Barma via sa société Tout sur l’écran, mais également la seule de cette boîte à être un jeu TV (sauf si on compte On n’demande qu’à en rire dans ce genre-là… mais c’est pas trop mon cas), celle-ci nous ayant surtout habitués à des talks et des émissions d’opinion par la suite. On sent d’ailleurs un peu cette patte, dans le jeu, et ce n’est pas sans apporter un petit plus à son ambiance. Mais sans plus tarder, lançons-nous plus en détail dans le visionnage.
La TV, encore la TV, toujours la TV
Bon, le titre vend plutôt bien la mèche à ce sujet : ce jeu va exclusivement porter sur le média qu’est la télévision, en posant des questions qui se rapporteront uniquement à celle-ci, notamment au sujet des personnalités notables du média, des émissions, ou encore des séries.
Je reconnais que c’était plutôt osé et peu courant pour l’époque (et toujours assez peu courant aujourd’hui, d’ailleurs…) de faire un jeu portant exclusivement sur un domaine de compétence précis, et en particulier la télévision (même si du coup, ça fait un peu autoréférencé sur les bords). D’ailleurs, à ma connaissance, ça doit être le seul jeu à s’intéresser en particulier à ça. En règle générale, les autres domaines qui ont le droit à ce privilège sont le plus souvent la musique (que ce soit via les innombrables émissions de blind-test comme Fa si la chanter, ou N’oubliez pas les paroles qui a inventé une autre façon de jouer sur la chanson) ou le cinéma (notamment avec le regretté Pierre Tchernia et ses Monsieur Cinéma et Jeudi Cinéma).
Et j’aime bien le fait que ce jeu aille à fond dans son thème. On sent que le jeu a été fait par des passionnés, pour des passionnés. Enfin, pas que, la télévision étant heureusement un média assez « mainstream » pour que le public lambda puisse s’y intéresser un minimum, ce qui rend ce jeu suffisamment accessible pour susciter l’intérêt, mais pas trop accessible non plus de sorte que les candidats doivent avoir une culture télévisuelle tout de même assez solide.
En outre, l’émission se donnera la possibilité de montrer des extraits d’archives télévisuelles de temps à autre, pour illustrer certaines questions, et même de faire appel à des personnalités sur le plateau (mais on y reviendra).
A ce niveau, le plateau de jeu illustre plutôt bien ce thème-là, avec une charte graphique qui n’est pas sans rappeler les mires de l’époque, qui étaient elles aussi très colorées (et qui servaient à l’étalonnage et au réglage de l’affichage de l’image. D’ailleurs, on sent là encore la patte de Tout sur l’écran, car je ne serais pas étonné que cette ambiance colorée ait inspiré l’habillage et le plateau du futur On a tout essayé apparu l’année suivante.
Mais bon, ces décors criards rendent également ce jeu très… daté. On sent instantanément au visionnage qu’on est dans les années 90 ; et même si j’aime bien la vibe de cette époque, je reconnais que ça ne vieillit pas forcément très bien visuellement, et que cette abondance de couleurs peut être légèrement pète-rétine. Si ce jeu avait été conçu 20 ans plus tard, on aurait probablement trouvé un moyen un peu plus sobre de thématiser le plateau.
Et je pourrais quelque peu en dire autant de certains effets sonores, qui pouvaient peut-être être marrants pour l’époque, mais qui me paraissent à présent très kitsch, comme celui employé pour signaler des mauvaises réponses. Remarquez, TLMVPSP aussi avait bien des effets sonores débiles lui aussi, et il les a eus entre entre 2006 et 2021… comme quoi, ce n’est pas forcément une question de date…
On s’amuse bien avec la mécanique du jeu
Après, c’est bien beau de faire un jeu qui se base sur un domaine précis ; mais si on s’en sert juste pour donner de l’intérêt à une mécanique banale à pleurer, ça n’a pas trop de quoi m’inspirer pour en faire une critique.
Fort heureusement, ce jeu va beaucoup s’amuser avec ses possibilités, à tel point que ce ne seront pas moins de six manches qui seront proposées au total. Ce jeu est plutôt généreux pour proposer autant de manches qui ont chacune un principe différent, en général les jeux TV montent rarement au-delà de quatre ou cinq ! Même si on verra que le principe de certaines d’entre elles n’a rien de bien révolutionnaire, au moins ça accorde à ce jeu une diversité assez plaisante, celles-ci s’enchaînant de manière assez fluide. Le jeu n’est pas sans temps morts ça et là, mais même ceux-ci restent dans le thème global, puisqu’ils serviront la plupart du temps à parler de télévision.
Globalement, la trame du jeu est la suivante : trois binômes de candidats s’affrontent entre eux, et leur but est d’avoir le plus de points possible en répondant correctement aux questions posées ; au bout de la troisième manche, le binôme qui a le moins de points est éliminé ; et à l’issue de la cinquième manche, le binôme qui a le plus de points dispute la finale.
Les candidats gardent leur nombre de points durant toute la partie (y compris entre les manches 3 et 4).
Dans la première manche, chaque binôme se verra attribuer un thème (qui sera plus précisément une personnalité de la TV) ; et ils devront répondre à 3 questions, chacune rapportant un point par bonne réponse donnée. Rien d’original, mais ça permet d’introduire simplement le thème de l’émission.
Même si je trouve un peu dommage que les binômes n’aient pas de pouvoir de décision quant au thème qui leur est attribué. On aurait pu jouer un peu plus là-dessus, avec par exemple des questions de rapidité qui auraient permis aux binômes les plus efficaces de choisir leur thème. Cela dit, comme c’est juste pour trois questions, ça passe.
Dans cette manche, on montre des images d’archive, et on pose ensuite deux questions qui ont un rapport avec.
Ca va légèrement plus poser problème pour la manche suivante, qui est un peu dans le même ordre d’idée, mais avec un enjeu plus important. Car là encore, les binômes n’auront pas le choix du thème qui leur sera attribué, et qui sera cette fois-ci une série.
Cette fois-ci, ils ne devront pas répondre à une série de questions, mais donner le plus d’informations possibles concernant le contenu de la série demandée (le nom de son personnage principal, des personnages secondaires, leur profession, l’univers, les lieux…) dans un temps imparti.
Avec une petite excentricité : les membres de chaque binôme devront parler à tour de rôle, et devront laisser leur partenaire continuer lorsque l’animateur appuiera sur sa télécommande (j’avoue, c’est un détail amusant qui colle bien au thème du jeu), ce qu’il fera deux ou trois fois durant les 40 secondes de jeu.
Chaque réponse attendue rapportera un point au binôme.
Ici, les candidats doivent donner le plus d’informations possibles au sujet de la série Goldorak…
Cette manche est l’une des plus originales du jeu, et elle n’est d’ailleurs pas sans rappeler la troisième manche du Au pied du mur de France 3… avec un peu les mêmes défauts, puisque les candidats n’ont aucune garantie que ce qu’ils sont susceptibles de décrire faisait bien partie de la liste de réponses attendue par la production, donnant à cette manche un côté un peu hasardeux (en plus de celui de ne pas avoir le choix de la série à décrire).
Néanmoins, je préfère l’application de ce principe dans cette émission-ci plutôt que dans Au pied du mur, dans la mesure où elle fait vraiment appel à la culture personnelle des candidats (là où dans APDM, c’était uniquement de la description visuelle), et où le fait de savoir pas mal de choses sur la série en question les aidera à avoir davantage de points.
… et les réponses attendues par la production sont dévoilées après.
En troisième manche, les binômes vont cette fois-ci s’affronter un peu plus directement, puisqu’ils seront équipés d’un buzzer. Le but de cette manche sera de deviner quelle personnalité de la TV est cachée dans la boîte mystère, sur le plateau.
L’animateur va leur poser plusieurs questions, et chaque bonne réponse va leur donner un point. Après chaque question, un indice est dévoilé depuis la boîte, et les candidats peuvent buzzer pour faire une proposition sur la personnalité à laquelle ils pensent. Attention cependant, si deviner juste rapporte 2 points au binôme victorieux, ne pas donner la bonne les exclut pour le reste de la manche… donc il vaut mieux être vraiment sûr de son coup.
Lorsque la personnalité est trouvée, elle sort de la boîte, blablate un peu (j’y reviens juste après), et pose une question de rapidité qui vaudra 2 points elle aussi. Puis le binôme qui a le moins de points est éliminé.
Si le côté « on pose des questions » n’a rien de très original, en revanche, ce qui va être intéressant, ce seront les indices divulgués progressivement, pour deviner le nom de la personnalité présente… physiquement ! Ce qui est plutôt un atout pour le jeu, qui appuie ainsi son thème, en invitant quelqu’un qui pourra par la même occasion parler d’anecdotes de tournage, et renforcer un peu le côté « geek » de l’émission. Ajouté au fait que sa présence sert à la mécanique de jeu : ça, c’est de l’intervention de people plutôt utile !
Même si cet après-révélation va quelque peu ralentir le rythme du jeu, puisqu’il faudra attendre le temps que l’invité papote… et fasse la promo de son actualité (s’il est susceptible de le faire), parce que ça ne semble définitivement pas envisageable de faire venir un people dans une émission sans passer par là (soupir…).
Oui, la main de la personnalité est un indice. Et à moins d’être particulièrement observateur, le maximum qu’on en déduit, c’est souvent le genre de la personnalité à deviner (et peut-être vaguement son âge).
Pour la quatrième manche, cette fois-ci, un seul candidat par binôme joue, et choisit un thème parmi ceux qui sont proposés. Ils n’ont pas un titre directement évocateur, mais donnent une idée de ce qui peut se cacher derrière. Puis…
on a l’équivalent de la deuxième manche du Grand Concours ou de Attention à la marche version 2 : autrement dit, le principe ultra classique où on pose des questions en rafale à un candidat, en lui comptant un point par bonne réponse.
Après, je pourrais néanmoins dire qu’il y a une petite originalité d’ordre visuel, dans la mise en scène, puisque le candidat qui joue est placé dans un téléporteur de Star Trek et disparaît progressivement au fur et à mesure que le chrono avance.
… je ne sais pas trop quoi dire à ce sujet. J’oscille entre le fait que ça a un côté plutôt fun et même assez geek, ce qui est finalement plutôt approprié pour un jeu de passionnés ; et le fait que ça reste purement cosmétique, et que ça n’apporte pas grand-chose à la mécanique de jeu. Mais finalement, ça reste dans l’état d’esprit global de l’émission, donc ça passe.
… c’était pour nous montrer que les monteurs savaient utiliser des effets spéciaux ?
La cinquième manche va à nouveau faire jouer les binômes en alternance.
Chacun leur tour, les binômes vont choisir l’un des thèmes parmi les 8 à disposition ; puis le nombre de points en jeu derrière le thème est dévoilé, une image d’archive est montrée, et une question est posée, permettant de remporter les points en jeu si la réponse est bonne. Chaque binôme a droit à trois questions selon ce principe.
Cette manche est pour moi la plus faiblarde du lot. Outre le principe assez basique, l’idée d’avoir un nombre de points par question pris au hasard n’est pas très judicieuse, d’autant plus que ça peut être assez variable (vu le peu d’archives disponibles, je ne saurais dire quel est le minimum/maximum de points, mais il pouvait descendre au plus jusqu’à 2 et grimper au moins jusqu’à 6, ce qui pouvait déjà faire des écarts potentiellement conséquents). Quitte à avoir un nombre de points variable en jeu, j’aurais préféré qu’on propose un choix de niveau de difficulté, avec davantage de points en jeu si le binôme choisit un thème plus difficile.
Les noms des thèmes sont… plus ou moins évocateurs, comme vous pouvez le voir.
La finale consiste à monter un escalier dont les marches sont divisées en plusieurs cases. Chaque case est une réponse possible à une question que l’animateur va poser, et les candidats devront donc choisir la bonne afin de pouvoir monter d’une marche (sinon, ils devront redescendre d’une marche). Ils devront monter l’ensemble des marches en moins d’une minute pour gagner.
Bon, présenté comme ça, ça a l’air très fun ; mais à l’instar du téléporteur façon Star Trek, ça reste surtout un effet de manche pour maquiller un principe très basique, puisque ça reste tout simplement une succession de QCM. Cela dit, je reconnais que ça reste une mise en forme plutôt amusante.
La finale d’ Attention à la marche aurait pu s’inspirer de celle-ci, d’ailleurs, en rendant ses marches davantage interactives comme ici…
Bref, dans l’ensemble, ça donne une succession de manches variées, un peu inégales ; mais qui, dans l’ensemble, forment un tout à peu près fun et cohérent.
Et je n’ai pas grand-chose à dire de plus à ce sujet, donc je vais passer à la conclusion…
Total : 13/20
A défaut d’être un jeu révolutionnaire dans son déroulement, Les cinglés de la télé reste une émission très divertissante et passionnée, qui sait amuser le public et qui sait s’amuser avec son contenu. Si les manches présentent pour la plupart des principes assez basiques, elles parviennent toutefois à donner à ce jeu une certaine diversité, et à proposer des mises en scène plutôt créatives, qui les rendent finalement assez fun à regarder. Ca me fait un peu regretter que Tout sur l’écran n’ait pas tenté de produire d’autres jeux par la suite, car celui-ci avait tout de suite su se trouver une certaine identité.
Difficile de dire en revanche si le jeu aurait pu encore bien tenir la route tel quel à l’heure actuelle, entre le côté très « 90’s » de la production qui pourrait peut-être paraître un peu kitsch aujourd’hui, et le fait que le média télévisuel a perdu de sa superbe au fil du temps. Néanmoins, ça reste une découverte qui valait vraiment le coup d’œil pour moi.
Et en parlant de télévision, ce ne serait pas plus mal que j’élargisse un peu le panel de chaînes dont j’ai déjà eu l’occasion de parler, non ? Je vais voir si je n’ai pas un jeu en stock qui pourrait y correspondre…